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Les SELLA : ils reviennent à Côte Rouge 52 ans après !

Martine et Albin SELLA. 73 et 79 ans. Ils reviennent à l’usine de Côte Rouge 52 ans après l’avoir quittée en 1971, accompagnée de presque toute la smala. Leurs filles, le gendre, les petits-enfants, tous impatients de voir où papy et mamy se sont rencontrés, y ont travaillé et se sont mariés. Albin y est né. En janvier 1944. Son père, Robert, est né aux Issers. Une famille d’émigrés italiens. Après bien de petits métiers, il échoue à l’usine de Côte Rouge en 1940, alors que la seconde guerre mondiale battait son plein.

Photo de famille. Les SELLA, les anciens et une partie du staff d’Alieco Côte Rouge

Albin a grandi dans l’enceinte de l’usine de Côte Rouge, connu depuis 1942 sous le nom de Neyrpic Afrique, et dès ses 18 ans révolus, il y travailla de novembre 1962 à juin 1971. C’est là aussi qu’il rencontra Martine, celle qui allait devenir son épouse. et qui habitait juste en face de l’usine Neyrpic, dans l’actuel siège de Hydrotechnique, anciennement et jusqu’à sa nationalisation en 1978, connu sous le nom d’entreprise BACHY.

Retour aux sources

Dimanche 22 octobre 2023. 14h00. La grande famille des SELLA arrive à l’unité Alieco de l’Encc. Dans le trajet de moins de 100 mètres séparant l’aire de stationnement « visiteurs » à l’entrée de l’usine, jusqu’à la direction de l’unité, que de souvenirs se bousculaient dans l’esprit des époux SELLA. Si les enfants sont plutôt curieux et découvrent le site, Martine et Albin revivent en accéléré toute une vie. Un saut dans le passé de plus de 50 ans.

Ils sont accueillis par le directeur de l’unité, M. Laouar, le staff de direction de l’unité, mais aussi trois anciens de Côte Rouge : Smaïl Baâhmed, ancien directeur industriel, qui a débuté à Côte Rouge en 1973 et qui a connu les derniers « Français » de Côte Rouge, partis avec la grande opération initiée par Boumédiène de l’algérianisation des cadres des entreprises publiques. Ali Zeghnoun, qui a débuté à l’unité de Côte Rouge en 1967 coïncidant avec un moment fort de la vie de l’usine : la grève des 37 jours en novembre 1967 qui précipita la nationalisation de Neyrpic Afrique, qui allait désormais s’appeler la Sn-Metal. Et puis Il y a Ahmed Ouahab, pratiquement le doyen de l’usine de Côte Rouge. Recruté en 1959, il a connu le père d’Albin, Robert, mais a aussi souvenance du couple Martine-Albin à la fin des années 60.

Dans le couloir de la direction, la mémoire est en ébullition. On évoque d’autres personnes, mais aussi des espaces de travail et de vie. Martine a la gorge nouée. Albin retrouve son usine natale. Ses parents résidaient dans l’usine de Côte Rouge. Tous deux n’arrivent toujours pas à croire que leur souhait de retourner en Algérie est devenu une réalité. Cinq jours pour se ressourcer et retrouver un pan de vie si précieux à leur yeux. Ils sont arrivés le 19 octobre pour repartir le 23. Alieco, l’usine de Côte Rouge a été la dernière étape de ce pèlerinage mémoriel. Plutôt, ils ont visité l’église Sainte-Marie-Saint-Charles de l’Agha où ils ont célébré leur mariage, aujourd’hui, mosquée Errahma. Et bien d’autres lieux dans l’Alger de leur jeunesse. Tout cela a été rendu possible grâce à la persévérance et l’insistance des enfants et petits-enfants.

Les premiers pas à Côte Rouge depuis 52 ans

Impatients de visiter l’usine de leur jeunesse, c’est à Albin qu’échoit la mission de nous guider dans son usine natale. Il se souvient des bâtisses originelles, de l’actuelle allée vers le nouveau parking réalisé dans le cadre du plan de développement de l’entreprise à partir de 2012. Il se souviendra qu’il y avait une réplique de barrage miniature avec tous les équipements. Mais aussi une maquette portuaire avec tout l’arsenal d’équipements jusqu’aux tétrapodes brise-lames.

Du côté de l’actuelle cantine, qui n’existait pas en leur temps, ils reconnaîtront le petit stade jusqu’à la configuration d’antan. Aujourd’hui, cet espace a été réaménagé mais les repères et les souvenirs y sont encore vivaces. « Comme ce banc où vous vous isoliez à la pause de midi, Albin et vous », dira Ahmed Ouahab à l’adresse de Martine émue qui au moment de contourner la bâtisse de la direction et ressortir sur l’allée principale et alors qu’Albin nous montre la « chambre » où il est né, redécouvre la bâtisse où elle a résidait jeune fille et avant de devenir madame SELLA : l’entreprise Bachy.

On visite les ateliers et le premier vestige à les interpeller c’est la plieuse 400 T avec la mention forgée dans l’acier : « Neyrpic Grenoble ». Martine se rappelle qu’elle traversait les ateliers en venant du bâtiment Le Cordier, en empruntant les escaliers reliant les hall 2 et 1, pour rejoindre Albin sur le banc du stade.

Des sommes de souvenirs, des noms, des bureaux et des équipements dont beaucoup n’existent plus ressurgissent. La mémoire est sollicitée, stimulée presque soumise à rude épreuve. Dans l’actuel atelier abritant les nouveaux équipements, Kaltenbach et autres, il y avait l’atelier des petits tours. Une vingtaine. « Cétait la valeur ajoutée de Côte Rouge qui en plus des équipements de barrage, excellait dans la fabrication des équipements de forage pour les plateformes pétrolières » .Ahmed Ouahab a ramené avec lui plein de photos d’époque. Les SELLA aussi. Albin exhibe même un certificat de travail qui lui a été délivré le 1er juillet 1971, au lendemain de la fin de contrat.

La montée des marches ou les escaliers d’une belle rencontre

Bâtiment Le Cordier. Martine est toute émue de retrouver l’endroit où elle a travaillé en qualité de dactylographe. Une première fois, dans un bureau au 1er étage, ensuite au second étage. Avec le plan de développement initié à partir de 2012, tout a changé. Mais pas les sensations et les émotions. Et surtout pas les escaliers.

Martine nous raconte que sa première rencontre avec Albin a eu dans ses escaliers du bâtiment Le Cordier. Elle montait et lui descendait. Et ce fut le coup de foudre. Alors ils ont rejoué la scène sous le regard ébahi des enfants et petits-enfants.

Que d’émotions en deux heures de temps. Un voyage dans le passé de l’usine de Côte Rouge dont Alieco et l’Encc ne peuvent que s’en enorgueillir.

Retour à la salle de réunion pour une collation qui a ravi nos invités par son thé et ses gâteaux traditionnels. Derniers échanges et remerciements. De petits souvenirs sont offerts aux invités dont trois plaques, gravures sur des plaques d’ardoise. L’une en hommage à Robert SELLA, le père. Et les deux autres pour Martine et Albin en souvenirs des années passées à Côte Rouge. On termine avec une dernière photo de famille et on se quitte avec un pincement au cœur. Mais ce n’est qu’un au revoir.

Photo de famille. M. Laouar, directeur d’unité, avec ses invités